jeudi 18 octobre 2012
THE PRETTY
THINGS
Entre
les Pretty Things et la Fête de la Musique à Marcq-en-Baroeul, c’est une longue
histoire d’amour. La première fois, c’était en 1989 : un petit podium
avait été installé sur le parking du magasin Match. Ils étaient de retour cette
année, à l’Hippodrome. Quelques minutes avant de monter sur scène, les deux
piliers du groupe, Phil May et Dick Taylor, m’ont confié leurs projets
immédiats : un album en édition limitée qui est déjà enregistré et qui sortira
à la fin de l’été, ainsi qu’une nouvelle tournée en mars 2012. Et, qu’ils en
soient remerciés, ils n’ont pas manqué d’adresser un salut amical au 97 rue du
rock.
D
Terrassé par l’annonce de
l’annulation du concert des Damned au Trabendo le 28 octobre dernier (Dave
Vanian avait mal au dos et était dans l’incapacité de jouer), j’avais bien
besoin de me « reKinkuer » ! Mais Ray Davies n’allait-il
pas, lui aussi, s’amuser à me faire faux bond ? Son concert, prévu le 19
octobre à l’Ancienne Belgique, à Bruxelles, avait été annulé « pour
cause d’enregistrement ». Il était rentré en studio pour mettre la touche
finale à son dernier album, baptisé See
My Friends, où il revisite le répertoire des Kinks en compagnie d’une belle
brochette d’invités…dont Bruce Springsteen, Jon Bon Jovi, Metallica et
Arno !
LADIES & GENTLEMEN …
THE ROLLING STONES
Il n’y aura pas, cette fois, de bataille
des chiffres entre la police et les syndicats. Nous nous sommes comptés. Nous
étions 36.
Comment
transformer un évènement très attendu en un fiasco
Le 7 octobre dernier, Ladies & Gentlemen était projeté
dans une trentaine de salles à travers toute la France, avant sa sortie en DVD.
Ce film est issu de la tournée américaine des Stones en 1972. Il fut présenté
au Ziegfeld Theatre de New York le 15 avril 1974 et ne fut ensuite diffusé que
dans quelques cinémas aux USA. Il n’avait jamais été distribué en Europe. Grâce
au regretté Freddy Hausser, qui nous a quittés il y a deux ans, et son émission
de rock Juke Box sur Antenne 2, on
avait pu en découvrir un extrait (le titre Happy)
en 1976. En février 2001, quelques rares privilégiés avaient eu droit à une
projection du film à la Cité de la Musique de Paris, suivie d’une rencontre
avec l’ami Bill Wyman. Mais c’est tout. La soirée du 7 octobre s’annonçait donc
comme un évènement. Deux salles avaient été sélectionnées dans la région
Nord-Pas-de-Calais : Le Majestic à Douai et Cinéville Nord à Hénin
Beaumont. Va pour Douai. Première déception : le cinéma se trouve en
périphérie de la ville. L’endroit est désert. La caissière, qui n’a pas l’air
très au courant, me demande si c’est pour l’avant-première et me propose un
ticket à 5.50 € alors que le prospectus indique 10 € et les affichettes,
parcimonieusement collées à l’entrée, 12 € !? Arrivé une bonne heure à
l’avance, je me mets en quête d’un peu de chaleur humaine et trouve refuge dans
La Boîte à Pizza située de l’autre côté du carrefour (Je vous recommande la
pizza merguez sauce barbecue). Retour au cinéma : l’endroit est toujours
aussi désert. Un peu surpris, je me dirige vers la salle. Là où je m’attendais
à un parterre de journalistes et rock critics, je me trouve en face d’une poignée
de spectateurs disséminés sur des fauteuils rouge et mauve au demeurant fort
confortables. Quand, enfin, l’écran s’alluma, nous étions 36 et encore,
j’inclus dans le nombre l’ouvreur, fan des Stones, qui, lui, au moins, avait
été informé ! Alors, il va bien falloir, un jour, se poser la question. La
décentralisation, c’est bien (on aurait pu prévoir une séance à Lille) mais à
condition de s’en donner les moyens. Si on ne fait pas de publicité, les gens
ne viennent pas. C’est aussi simple que ça. Quand CielEcran, à qui l’on a
confié l’opération du 7 octobre, ne daigne pas répondre aux demandes
d’information par e-mail ou téléphone et continue d’afficher sur son site, en
guise de communiqué de presse : « Le fichier est endommagé et
n’a pas pu être réparé », on ne peut guère s’en étonner.
Quel guitariste n’a pas, au début de son
apprentissage, sué sang et eau pour tenter de reproduire, avec plus ou moins de
bonheur, le riff d’intro de Come As You
Are, troisième plage du disque culte de Nirvana, Nevermind (1991) ? Le rapport avec Killing Joke ? Ecoutez
Eighties, le titre figurant sur leur
album Night Time, sorti six ans plus
tôt. Allez, je suis sûr que vous le reconnaissez, ce riff. C’est le même !
Disons que Killing Joke se l’est fait « emprunter » par Nirvana.
Une action en justice sera même intentée contre le groupe grunge de Seattle
mais, décence oblige, les poursuites seront abandonnées à la mort de Kurt
Cobain. Comme quoi les rockers ne sont pas tous des brutes immondes. D’ailleurs,
les relations entre les deux groupes n’en seront pas pour autant entamées puisque
Dave Grohl participera, comme batteur, à
l’album Killing Joke de 2003. Cela
dit, Killing Joke aurait eu mauvaise grâce à trop la ramener. En effet, on
retrouve le même riff (Allez vérifier si vous ne me croyez pas !) sur Life Goes On, un titre des Damned tiré
de leur album Strawberries (1982).
Si l’on se base sur la chronologie, ce sont eux les vrais créateurs. Je vous
reparlerai sans doute prochainement des Damned dans Heart Of Stone. Ils sont de
retour. Au grand complet- ou presque -avec Dave Vanian et Captain Sensible.
Mais en attendant, sachez que Killing Joke, lui aussi, tourne à nouveau dans sa
formation d’origine. Il sera au Bataclan de Paris le 27 septembre (avec les
Young Gods), à l’Ancienne Belgique de Bruxelles le 28 et à l’Aéronef de Lille
le 30. Il nous présentera, à cette occasion, les titres de son nouvel album
tant attendu, qui ne se nommera finalement pas Feast Of Fools (Le Banquet De Dupes) mais Absolute Dissent (Dissidence Absolue).
jeudi 4 octobre 2012
Avec
Johnny DOWD
Les
serpents ne sont pas là de se rendormir
Vous aimez Tom Waits et Nick
Cave ? Au risque de paraître iconoclaste et d’en choquer plus d’un, moi,
j’aime pô ! En revanche, j’adore Captain Beefheart, Zappa, Arno et, je
regrette juste de ne pas l’avoir découvert plus tôt… Johnny Dowd. Johnny
Dowd ? « Qu’est-ce qu’il fait, qu’est-ce qu’il a, qui c’est celui-là ?/Complètement
toqué, ce mec-là, complètement gaga/Il a un drôle d’accent, ce gars-là/L’a une
drôle de voix ». Ben justement, c’est ce que j’aime chez lui. Ce côté
bastringue et frappadingue. Les univers de Tom Waits et Nick Cave sont
glauques, un point c’est tout ! A chaque sortie d’album, je m’attends
d’ailleurs à ce que nous soit, enfin, fournie en bonus la corde avec laquelle
se pendre. Celui de Johnny Dowd est « glauque and roll ». Au bout de
la nuit, le voyage ne manque ni de folie ni de drôlerie. Humour, ironie,
dérision et poésie y ont leur place. Avis aux amateurs de roman noir. Johnny
Dowd est né le 29 mars 1948 à Fort Worth, près de Dallas. Il a grandi entre le
Texas, le Tennessee et l’Oklahoma avant de s’installer dans l’Etat de New York
pour y monter, avec son ami Dave Hinkle, une entreprise de déménagement, la
Zolar Moving Co. et aussi un groupe, les Jokers. Le ton était déjà donné :
les Jokers, les Plaisantins. Le groupe dure 5 ans, de 1981 à 1986. Johnny et
son comparse formeront un autre groupe, Neon Baptist, qui durera également 5
ans, de 1988 à 1993. Tiens, des adeptes du quinquennat ! Dowd approche de
la cinquantaine lorsqu’il se décide à enregistrer son premier album solo, Wrong Side Of Memphis. Pour un coup
d’essai, c’est un véritable coup de maître. Il sera suivi d’autres albums aux
titres évocateurs, comme Cemetery Shoes,
Les Chaussures De Cimetière (2004), Chainsaw
Of Life, La Tronçonneuse de La Vie (2006) ou A Drunkard’s Masterpiece, Le Chef-d’œuvre D’Un Ivrogne (2008). A
l’origine de ces parutions, l’excellent label Munich Records, qui vient de
frapper encore très fort en nous livrant la dernière pépite de Johnny Dowd, Wake Up The Snakes, Réveillez Les
Serpents, à découvrir de toute urgence ! Selon les propres dires de
l’auteur (on n’est jamais si bien servi que par soi-même), « Wake Up The Snakes est, je le jure, le
meilleur, le plus fun, des albums que j’ai enregistrés jusqu’à
maintenant ». Il ajoute : « Mon nouvel album nous
transporte à l’époque où la soul music, le garage rock, les bass fuzz, l’orgue
Farfisa, et les refrains à la « My Baby Left Me »
s’entrechoquaient ». Et de rendre hommage au groupe qui l’accompagne :
Matt Saccuccimorano à la batterie, Kim Sherwood-Caso au chant et à la guitare,
Michael Stark aux claviers (les puristes reconnaîtront le Vox Continental qui
rivalisa avec le Farfisa durant les années 60) et Willie B., alias Brian Wilson
(rien à voir avec les Beach Boys) à la guitare baryton. Il faut croire que
Johnny Dowd sait cultiver l’amitié puisque Kim Sherwood faisait déjà partie de
Neon Baptist, Willie B. jouait de la batterie sur Chainsaw Of Life et l’ingénieur du son, responsable de l’enregistrement
de Wake Up The Snakes, n’est autre
que Dave Hinkle, copropriétaire avec Johnny du studio The Shop à Willseyville
dans l’Etat de New York. Vous aimeriez, je suppose -c’est le but de cet
article- vous faire une opinion personnelle sur Johnny Dowd. Si vous espériez
le voir en live, c’est râpé ! Il était de passage à Nancy le 24 mai
dernier, au Festival Musique Action pour un concert unique en France. Si vous
comptez l’écouter à la radio, ne vous bercez pas d’illusions, elle est encore à
inventer, la station qui diffusera Lies,
un morceau de 6 :34. Alors, je ne vois plus qu’une solution : achetez
le dernier album de Johnny Dowd ! Vous ferez une bonne action mais je
doute que ce soit déductible de vos impôts. Vous y trouverez en tout cas votre
titre fétiche, celui qui vous trottera dans la tête toute la journée et vous
incitera, malgré ou à cause de la dure réalité, à sourire aux gens et à la vie.
J’ai trouvé le mien : Me And Mary
Lou.
Jumpin’ Jack D.
AEROSMITH
L’envie vous est-elle venue un jour de
faire l’amour dans un ascenseur? Il est des moyens moins risqués pour monter au
septième ciel. Demandez à Steven Tyler ce qu’il en pense. Le 5 août 2009,
Aerosmith se produit en plein air au rassemblement moto de Sturgis dans le
Dakota du Sud. A peine le concert débute-t-il qu’une panne de son survient au
beau milieu de Love In An Elevator.
Steven essaie alors de distraire le public en dansant sur le bord de la scène.
Et vas-y que je me trémousse ! Et vas-y que je tourne sur moi-même !
Et… badaboum ! Le sol était glissant à cause de la pluie et Steven avait
oublié de s’acheter des chaussures antidérapantes. Résultat des courses :
une fracture de l’épaule et des blessures à la tête et au cou. Au fait, vous
vous souvenez des paroles de la chanson que Steven a failli chanter ce
soir-là ? « Love in an elevator/Livin’ it up when I’m goin’ down/Love
in an elevator/Lovin’ it up till I hit the ground »(L’amour dans un
ascenseur, le plaisir monte alors que je descends, l’amour dans un ascenseur,
j’adore ça jusqu’à ce que j’heurte le sol)!!!
J’irai revoir mon
Aerosmith
Suite à cette
chute, la tournée nord-américaine avait dû être annulée, augmentant les
tensions persistantes au sein du groupe. Les rumeurs de séparation allaient bon
train, alimentées par les déclarations intempestives de Steven au magazine
musical britannique Classic Rock. Le
chanteur confiait qu’il souhaitait se concentrer sur un projet en solo. Pour ne
pas être en reste, le guitariste Joe Perry avait assuré au quotidien Las Vegas Sun : « Steven
est parti, pour autant que je sache. Je n’en sais pas plus que vous sur cette
histoire. J’ai vu sur Internet qu’il quittait le groupe. Il ne me répond même
pas au téléphone. C’est une habitude chez lui. Il n’a contacté personne. Ni
moi, ni aucun membre du groupe ». Bonjour l’ambiance ! On n’avait
jamais été aussi proche de la rupture. Alors que la rumeur enflait à propos du
départ de Steven, les noms de remplaçants potentiels commençaient déjà à
circuler : Lenny Kravitz, Paul Rodgers (après Queen, Aerosmith ?) ou
encore Billy Idol, l’ancien chanteur de Generation X. Non mais ça va pas la
tête ? N’importe quoi ! Aerosmith sans Steven Tyler, c’est comme un
barbu sans barbe. Heureusement les dieux du rock veillaient. Le mardi 10
novembre 2009, Joe Perry donnait un concert à New York dans le cadre de la
promo de son nouvel album solo Have
Guitar, Will Travel. Quelle ne fut pas sa surprise de voir Steven débarquer
dans les coulisses avant le rappel, bien décidé à faire taire toutes les
rumeurs. Le chanteur s’est invité sur scène et a offert à ses fans médusés une
version endiablée de Walk This Way,
le méga tube datant de 1975. Mais avant cela, il a pris la parole et tenu à
mettre les points sur les « i » : « Je veux que
New York le sache, je ne quitte pas Aerosmith. Et Joe Perry, tu es un homme
plein de couleurs, mais, moi, putain, je suis l’arc-en-ciel ! ».Ouf,
l’irréparable a été évité. Aerosmith reprend la route avec son frontman
original et il passera, alléluia, par Paris et son Palais Omnisports de Bercy,
le 29 juin prochain. Attention, concert unique en France ! Peut-être la
dernière occasion de les voir sur scène ! A l’heure où j’écris ces lignes,
il reste encore des places mais ce sera bientôt sold out. Vous savez ce qu’il
vous reste à faire ! Si vous préférez nos amis les Belges et les festivals
en plein air, rendez vous 4 jours plus tôt, le 25, à Dessel (près d’Anvers) pour
y applaudir, à l’occasion du quinzième anniversaire du Graspop Metal Meeting, Aerosmith, bien sûr, mais aussi Motörhead,
Saxon, Sepultura, Slayer et autres métalleux.
T’as la pêche,
Tallarico !
Steven Tyler, de
son vrai nom Stephen Victor Tallarico, est né à New York, le 26 mars 1948.
D’origine italienne et allemande par son père, cherokee et ukrainienne par sa
mère, il ne pouvait hériter que d’un tempérament fougueux. Il est renvoyé de
son école, Roosevelt High School, pour comportement violent et usage de drogue.
Mais la musique, dit-on, adoucit les mœurs et, sur les conseils de son père, pianiste
classique, il tente d’y canaliser toute son énergie. Sauf que lui préférera
jouer du rock’n’roll. Il a 16 ans quand il monte sa première formation :
les Strangeurs (avec un « u »pour éviter de confondre avec un
autre groupe qui s’appelait les Strangers). A l’époque, il était batteur. Très
vite, les Strangeurs changent de nom et deviennent Chain Reaction. En 1966, ils enregistrent deux
singles : The Sun/When I Needed You
et You Should Have Been Here
Yesterday/Ever Lovin’ Man. Ils peuvent même se vanter de faire les
premières parties de groupes comme les Yardbirds, les Byrds ou les Beach Boys.
Eté 70, Steven s’en va passer ses vacances à Sunapee, dans le New Hampshire. C’est là qu’a lieu sa rencontre
avec Joe Perry. Dans l’arrière-boutique d’un marchand de glaces ! (En
Grande-Bretagne, les groupes de rock naissent dans un pub. Question de culture
et de climat sans doute). Joe Perry joue alors de la guitare avec le Jam Band.
Les deux groupes fusionnent pour donner Aerosmith. Steven abandonne la batterie
pour le chant, Joe garde son instrument et s’adjoint un second guitariste, Ray
Tabano, remplacé dès 1971 par Brad Whitford. Tom Hamilton tient la basse et
Joey Kramer la batterie. Pourquoi baptisent-ils leur groupe Aerosmith, après
avoir un temps envisagé de s’appeler Hookers, « Les Putes » (c’était
pas mal non plus) ? Bonne question ! Il semblerait que ce soit Joey
Kramer qui ait choisi le nom. Alors qu’il était encore étudiant, il avait
beaucoup aimé l’album d’Harry Nilsson, Aerial
Ballet (Ca ne vous dit rien ? Et pourtant, vous connaissez un des
titres par cœur, Everybody’s Talkin’,
qui figure sur la B.O. du film Midnight
Cowboy). L’idée lui vint de chercher des noms de groupes qui commençaient
par Aero, il tomba sur Aerosmith qui lui plut tellement qu’il l’écrivait
absolument partout : au cutter sur sa table, au blanc sur sa trousse, au
marqueur sur la couverture de ses cahiers. C’est tout naturellement que, le
moment venu, il proposa ce nom aux autres membres du groupe. Ceux-ci crurent
tout d’abord qu’il leur parlait du roman de Sinclair Lewis, Arrowsmith, qu’on
les avait forcé à étudier en classe mais, lorsqu’il l’eut épelé, le nom fut
adopté parce qu’il sonnait bien.
Les cinq affreux
de Boston
Le groupe rode son
show dans un club de Sunapee, The Barn (La Grange). Il touche la somme
mirifique de trente dollars par soir mais, grâce au bouche à oreille, sa
popularité grandit et lui permet de s’installer carrément à Boston. Boston,
Mets tes chaussettes ! Oops ! Massachusetts (Pardonnez-moi, je ne
résiste pas à ce genre de jeu de mots vaseux, il faudra vous y faire !).
Après deux ans passés à écumer tous les bars de Boston, vient l’heure de la
consécration, Aerosmith joue au Max’s Kansas City, le célèbre club new-yorkais.
Impressionné par leur prestation, Clive Davis, Président de Columbia Records,
leur offre un contrat. Ils sortent un premier album éponyme en 1973. Les rock
critics, peu sagaces sur ce coup-là, font semblant d’ignorer que Steven signe
sept des huit titres qui le composent (il n’y a, fait exceptionnel pour un
premier disque, qu’une seule reprise, celle de Rufus Thomas, Walkin’ The Dog) et ne voient en lui
qu’un clone de Mick Jagger : même bouche, même déhanché. Le single Dream On atteint péniblement la
cinquante-neuvième place des charts et il faudra attendre trois ans pour que
cette superbe ballade soit rééditée et fasse un carton. Leur deuxième album, Get Your Wings (1974) sur la pochette
duquel l’on peut voir pour la première fois le fameux « A » ailé qui
devait devenir leur logo ne connaît pas un meilleur sort, malgré des titres
comme Train Kept A-Rollin’, Lord Of The Thighs et Same Old Song And Dance. Le succès
arrive enfin avec Toys In The Attic,
Les Jouets Dans Le Grenier (1975). Le disque est certifié platine assez
rapidement et restera plus d’un an dans les hit-parades. Il contient de grands
classiques comme Sweet Emotion ou Walk This Way qui connaîtra une seconde
jeunesse, onze ans plus tard, grâce au groupe de rap Run-DMC. Je pourrais
évidemment continuer de retracer la carrière d’Aerosmith jusqu’à aujourd’hui,
mais ces années-là, chers lecteurs, vous êtes censés les connaître. Je préfère
finir par les anecdotes qui courent sur les cinq affreux de Boston (à noter que
c’est la même formation depuis le début, un fait rare qui mérite d’être
signalé) et leur penchant pour les substances illicites. Et ceci pour deux
raisons. 1. On n’a plus tellement l’occasion de rigoler de nos jours. 2. Même
si ces anecdotes sont trop belles pour être vraies, elles témoignent qu’on
mesure la grandeur d’un groupe au mythe qui l’entoure. Un jour, défoncés, Tyler
et Perry, les « Toxic Twins », arrêtent leur concert après un
seul morceau. Ayant commencé d’entrée par le dernier titre de la set list, ils
avaient cru que le concert était fini. Une autre fois, Tyler suggère à Perry de
reprendre une chanson qu’il vient d’entendre à la radio et qu’il trouve
géniale, Perry lui fait gentiment remarquer que la chanson s’appelle You See Me Cryin’, qu’elle est d’eux et
qu’elle figure sur l’album Toys In The
Attic qu’ils ont enregistré dix ans auparavant !!!
Jumpin’ Jack D.
EXILE ON MAIN STREET
Il en est des Stones comme des nuages de
cendres du volcan Eyjafjöll : ils empêchent les cons de voler. La
réédition (38 ans plus tard) de l’album Exile
On Main Street ce lundi 17 mai ramènera nombre d’actuels prétendants à la
célébrité là où ils méritent de rester : au ras des pâquerettes.
Nostalgie ? Que nenni ! Je partage entièrement l’avis de Nick Hornby
qui, à propos de son dernier roman
Juliet, Naked, déclare : « Pour moi, il y a deux sortes de
musiciens. D’un côté, les grands groupes comme les Beatles, les Stones, des
chanteurs comme Bob Dylan, qui sont de grands artistes parce qu’ils ont
toujours été fans de musique. De l’autre, ceux qui veulent être célèbres à
travers la musique. » Aucun rapport, en effet, entre de vrais talents
créatifs et des produits lisses, formatés, tout juste générateurs d’un vague
plaisir éphémère.
Goodbye England
1971 : tout
bascule pour les Stones. Suite aux entourloupes de leur manager Allen Klein,
ils se retrouvent avec une dette de 29 millions de dollars. S’ils parviennent à
se débarrasser de ce personnage peu reluisant (il est décédé le 4 juillet 2009
à l’âge de 77 ans, victime de la maladie d’Alzheimer : paix à son
âme !) en ne renouvelant pas leur contrat avec Decca et en créant leur
propre label, ils se font quand même bien arnaquer. Klein garde les droits sur
tous les morceaux enregistrés et édités durant la période 1963-1970. Sa société
ABKCO (Allen B. Klein Company) en est d’ailleurs toujours propriétaire à ce
jour. C’est grâce à elle qu’est sortie (novembre 2009) la magnifique réédition
de l’album live Get Yer Ya-Ya’s
Out ! et les Stones n’ont
pas touché un picaillon pour l’occasion. C’est ballot, non ? Toujours
est-il qu’en 1971, ils sont fauchés. C’est le moment que choisit
l’establishment, incarné à l’époque par le Premier Ministre conservateur Edward
Heath, pour les enfoncer encore un peu plus. Après avoir vainement essayé de
les foutre en taule pour des histoires de drogue, il lance le fisc à leurs
trousses. Le Daily Telegraph révèle que le chiffre d’affaires réalisé par le
groupe depuis le début de sa carrière se
monte à 83 millions de livres. La somme mentionnée est sans doute exagérée et Jagger
la juge grotesque. En tout cas une chose est sûre, c’est que la Couronne
britannique n’hésite pas à taxer les Stones à 97 %. Trop, c’est trop !
Mick, Keith et les autres décident de quitter l’Angleterre et de s’installer en
France. Le 5 mars 1971, leur agent publicitaire, Les Perrin, déclare qu’ils ne
partent pas pour échapper au fisc (bah tiens) mais parce qu’ils aiment
énormément la France. Le 30 mars : soirée d’adieu au Skindles Hotel, à
Maidenhead, près de Londres. Parmi les invités on note la présence de John
Lennon, Yoko Ono et Eric Clapton.
Nellcôte ou
Hellcôte ?
Comme le dit
Aznavour (Emmenez-moi), « il me
semble que la misère serait moins pénible au soleil ». Forts de ce
conseil, les Stones mettent le cap sur le sud de la France. Leur misère est, il
faut bien le dire, toute relative. Ils n’arrivent pas au Port Pierre Canto de
Cannes « sur un rafiot craquant de la coque au pont » mais sur
un yacht. Mick prend une maison à Mougins, fief de Pablo Picasso. Bill Wyman
s’installe à La Bastide Saint-Antoine à Grasse. Par la suite, il dénichera une
villa à Vence où il vit toujours, c’est elle qui figure sur la pochette de son
album éponyme Bill Wyman (1981),
j’en connais l’adresse précise pour m’y être rendu mais je me garderai bien de
vous la communiquer. Mick Taylor habite également Grasse. Charlie Watts, en bon
père tranquille, s’est retiré dans une petite ferme des Cévennes. Quant à Keith
Richards, dernier arrivé, il loue une somptueuse villa à
Villefranche-sur-Mer : la villa Nellcôte. Au départ, les Stones pensaient
pouvoir trouver un studio à Cannes, Nice ou Marseille mais, leurs recherches
n’ayant pas abouti, ils décident finalement d’installer leur matériel dans le
sous-sol de la villa de Keith. C’est là qu’ils enregistrent leur nouvel opus
qui aurait très bien pu s’appeler Exile At Nellcôte si le mixage final n’avait
eu lieu dans les studios de Main Street à Los Angeles. Jamais les circonstances
entourant la confection d’un album n’en ont autant déterminé le contenu. De
juillet à novembre 1971 Nellcôte se métamorphose en Hellcôte. Une saison en
enfer, pour reprendre le titre de l’ouvrage de Robert Greenfield : A Season In Hell. Les Stones apprennent
à danser avec le Diable (Dancing With Mr
D. ne sortira que sur l’album suivant : Goat’s Head Soup). Si une bannière avait été accrochée au portail
de Nellcôte, c’eût été : Sex& Drugs & Rock’N’Roll. Les bouteilles,
les joints mais aussi les filles passaient de main en main. On raconte même que
Jagger aurait profité de ce que Richards s’assoupisse après une prise d’héroïne
pour coucher avec sa compagne d’alors Anita Pallenberg, réitérant ainsi leur
brève aventure pendant le tournage de Performance,
une année auparavant. A Nellcôte c’est opération portes ouvertes tous les
jours, un défilé permanent d’amis musiciens (le saxophoniste Bobby Keys, le
pianiste Ian Stewart, le producteur Jimmy Miller, Gram Parsons qui a peut-être
participé à l’enregistrement d’ Exile On
Main Street mais qui a surtout passé son temps à se droguer avec son pote
Keith), de techniciens, photographes (Dominique Tarlé), célébrités locales,
fans, parasites, dealers, squatters en tous genres. On entre et on sort comme
dans un moulin, à tel point qu’un jour de septembre, en plein jour, des
cambrioleurs ressortent tranquillement de la villa en emportant neuf guitares
appartenant à Richards, le saxophone de Bobby Keys et la basse de Bill Wyman
pendant que ses occupants regardent la télévision dans la salle de
séjour. « Nous avons récupéré la plupart des guitares. La justice l’a
emporté. N’en disons pas plus. » dira Keith Richards, laissant courir la
rumeur que les auteurs du vol, des dealers venus de Marseille pour récupérer
l’argent qu’il leur devait, auraient fini au fond de la baie de Villefranche,
les pieds enserrés dans un bloc de ciment. Keith conserve de très bons
souvenirs de son séjour à Nellcôte : « Il y avait un cuistot,
Big Jacques, qui a fait sauter la cuisine. Une énorme explosion ! ».
Il se rappelle aussi qu’ils s’amusaient à piquer le courant à la SNCF quand les
plombs sautaient ou que le générateur flanchait.
Si vous passez par
Villefranche-sur-Mer et que l’envie vous prend de voir en vrai la villa
Nellcôte sans laquelle Exile On Main
Street n’aurait jamais existé, évitez-vous de longs errements, prenez la
direction de Saint-Jean-Cap-Ferrat et demandez la Résidence Pierre (Stone, en
anglais) & Vacances. C’est juste à côté. Vous croyez au déterminisme ?
La Résidence s’appelle L’Ange Gardien. Il n’en fallait pas moins pour veiller
sur Keith et sa bande. « On se droguait. Cela dit, pas question de
m’imiter. Tout le monde n’a pas ma constitution ! La réalité, c’est que
nous avons pris un grand risque en réalisant Exile dans ces conditions. Mais ça a marché. L’album le prouve.
Les Stones sont capables de casser la baraque lorsqu’ils prennent des
risques » (Keith Richards).
Jumpin’
Jack D.
« C’est
un Chuck Berry anglais ». Déclaration de Paul Weller dans le magazine musical
de The Observer, daté du dimanche 9 novembre. Paul Weller, ex-Jam, ex-Style
Council, qui n’hésite pas à classer Down
By The Jetty du bon vieux Dr Feelgood (1975) parmi les cinq albums qui
ont jalonné sa vie et sa carrière. Un homme de goût !
Bouche à bouche
Wilko
est né le 12 juillet 1947 à Canvey Island (Essex) dans l’estuaire de la Tamise.
Son vrai nom est John Wilkinson. C’est pas bon, ça, coco ! Tu découpes, tu
mélanges et t’obtiens… Wilko Johnson. Tu veux réussir ou quoi ? Vers
la fin des années 60, il est étudiant en littérature à Newcastle mais il
retourne régulièrement à « s’ baraque » pour y jouer dans des groupes
locaux comme The Roamers ou The Heap. Ayant décroché un diplôme, il part en
Inde, chose courante pour un jeune de l’époque. On a du mal, aujourd’hui, à
l’imaginer avec des fleurs dans les cheveux (où les accrocherait-il ?)
mais bon. C’est à son retour que notre hippie fait la rencontre de Lee
Brilleaux. Alors qu’il se promène, il remarque un gars portant un disque de
Little Walter. La discussion s’engage et le courant passe. Dr Feelgood est né…
comme naissent les plus grands groupes de rock’ n’ roll. Souvenez- vous de Mick
Jagger et Keith Richards se croisant sur le quai de la gare de Richmond le 17
octobre 1961. « J’avais sous le bras, entre autres disques rares, le One Dozen Berrys de Chuck Berry,
et Keith m’a dit : Bon sang, voilà des disques intéressants ! »
(Jagger). Au fait, avez-vous noté une autre ressemblance entre les deux
groupes ? Faites rentrer sa langue à la fameuse bouche des Stones, exhibez
à la place de jolies dents saines et blanches, figées en un sourire étincelant
à la Fernandel, rehaussez le tout d’une paire de lunettes noires : vous
venez de créer le logo de Dr Feelgood.
Le docteur devient malade
De 72 à 77, Wilko pratique la médecine
du Docteur Feelgood, en compagnie de ses aides-soignants : Lee Brilleaux (qui
nous a quittés il y a bientôt 5 ans), John B. Sparks et Johnny Martin (alias
The Big Figure, ami d’enfance et ex-Roamers). Il signe la quasi-totalité des
prescriptions contenues dans les deux albums de légende : Down By The Jetty et Malpractice. Mécontent de l’inclusion
contre son gré de la chanson de Lew Lewis Lucky
Seven sur Sneakin’ Suspicion en
mars 77, il quitte le cabinet de consultation. D’une susceptibilité à fleur de
peau, il a du mal à supporter que le morceau, composé par un musicien extérieur
au groupe, figure sur l’album. Marre de jouer au docteur. Après la courte
aventure des Solid Senders avec John Potter aux claviers, Steve Lewins à la
basse et Alan Platt à la batterie, il passe dans le camp des malades. En 79, en
effet, il rejoint The Blockheads (Les Débiles) de Ian Dury, avec qui il restera
jusqu’en 1980. Depuis, il mène une carrière solo et, quand il n’est pas au
Japon, où il jouit d’une popularité énorme, il écume tous les pubs et autres
lieux propices à son déferlement de folie.
Ah bon, Wilko, il tourne toujours ? Ben, merde alors !!!
Non seulement il tourne toujours mais
il sera chez nous le 3 décembre, à la Boîte à Musiques de Wattrelos.
Figurez-vous que deux jours plus tard, il passera au Halfmoon de Londres, la
salle mythique qui, depuis le début des années 60, a vu défiler les plus
grosses pointures du rock ( les Stones y étaient encore en mai 2000 pour un
concert privé). L’album live de Wilko, malheureusement très difficile à
trouver, Don’t Let Your Daddy Know (1991)
y fut enregistré. J’espère que vous vous rendez compte de l’immense privilège
qui vous est accordé : vous faire mitrailler avant tout le monde par la
Fender Telecaster noire de Wilko. N’ayez pas peur de vous mettre en première
ligne. Participez au carnage organisé par notre mafioso à tête de Frankenstein
et ses deux acolytes : le bassiste Norman Watt-Roy, ex-Blockhead et le
batteur Steve Monti, ex-Curve, ex-Jesus and Mary Chain. Ca va saigner !
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