jeudi 4 octobre 2012


AEROSMITH


    L’envie vous est-elle venue un jour de faire l’amour dans un ascenseur? Il est des moyens moins risqués pour monter au septième ciel. Demandez à Steven Tyler ce qu’il en pense. Le 5 août 2009, Aerosmith se produit en plein air au rassemblement moto de Sturgis dans le Dakota du Sud. A peine le concert débute-t-il qu’une panne de son survient au beau milieu de Love In An Elevator. Steven essaie alors de distraire le public en dansant sur le bord de la scène. Et vas-y que je me trémousse ! Et vas-y que je tourne sur moi-même ! Et… badaboum ! Le sol était glissant à cause de la pluie et Steven avait oublié de s’acheter des chaussures antidérapantes. Résultat des courses : une fracture de l’épaule et des blessures à la tête et au cou. Au fait, vous vous souvenez des paroles de la chanson que Steven a failli chanter ce soir-là ? « Love in an elevator/Livin’ it up when I’m goin’ down/Love in an elevator/Lovin’ it up till I hit the ground »(L’amour dans un ascenseur, le plaisir monte alors que je descends, l’amour dans un ascenseur, j’adore ça jusqu’à ce que j’heurte le sol)!!!

J’irai revoir mon Aerosmith

    Suite à cette chute, la tournée nord-américaine avait dû être annulée, augmentant les tensions persistantes au sein du groupe. Les rumeurs de séparation allaient bon train, alimentées par les déclarations intempestives de Steven au magazine musical britannique Classic Rock. Le chanteur confiait qu’il souhaitait se concentrer sur un projet en solo. Pour ne pas être en reste, le guitariste Joe Perry avait assuré au quotidien Las Vegas Sun : « Steven est parti, pour autant que je sache. Je n’en sais pas plus que vous sur cette histoire. J’ai vu sur Internet qu’il quittait le groupe. Il ne me répond même pas au téléphone. C’est une habitude chez lui. Il n’a contacté personne. Ni moi, ni aucun membre du groupe ». Bonjour l’ambiance ! On n’avait jamais été aussi proche de la rupture. Alors que la rumeur enflait à propos du départ de Steven, les noms de remplaçants potentiels commençaient déjà à circuler : Lenny Kravitz, Paul Rodgers (après Queen, Aerosmith ?) ou encore Billy Idol, l’ancien chanteur de Generation X. Non mais ça va pas la tête ? N’importe quoi ! Aerosmith sans Steven Tyler, c’est comme un barbu sans barbe. Heureusement les dieux du rock veillaient. Le mardi 10 novembre 2009, Joe Perry donnait un concert à New York dans le cadre de la promo de son nouvel album solo Have Guitar, Will Travel. Quelle ne fut pas sa surprise de voir Steven débarquer dans les coulisses avant le rappel, bien décidé à faire taire toutes les rumeurs. Le chanteur s’est invité sur scène et a offert à ses fans médusés une version endiablée de Walk This Way, le méga tube datant de 1975. Mais avant cela, il a pris la parole et tenu à mettre les points sur les « i » : « Je veux que New York le sache, je ne quitte pas Aerosmith. Et Joe Perry, tu es un homme plein de couleurs, mais, moi, putain, je suis l’arc-en-ciel ! ».Ouf, l’irréparable a été évité. Aerosmith reprend la route avec son frontman original et il passera, alléluia, par Paris et son Palais Omnisports de Bercy, le 29 juin prochain. Attention, concert unique en France ! Peut-être la dernière occasion de les voir sur scène ! A l’heure où j’écris ces lignes, il reste encore des places mais ce sera bientôt sold out. Vous savez ce qu’il vous reste à faire ! Si vous préférez nos amis les Belges et les festivals en plein air, rendez vous 4 jours plus tôt, le 25, à Dessel (près d’Anvers) pour y applaudir, à l’occasion du quinzième anniversaire du Graspop Metal Meeting, Aerosmith, bien sûr, mais aussi Motörhead, Saxon, Sepultura, Slayer et autres métalleux.

T’as la pêche, Tallarico !

    Steven Tyler, de son vrai nom Stephen Victor Tallarico, est né à New York, le 26 mars 1948. D’origine italienne et allemande par son père, cherokee et ukrainienne par sa mère, il ne pouvait hériter que d’un tempérament fougueux. Il est renvoyé de son école, Roosevelt High School, pour comportement violent et usage de drogue. Mais la musique, dit-on, adoucit les mœurs et, sur les conseils de son père, pianiste classique, il tente d’y canaliser toute son énergie. Sauf que lui préférera jouer du rock’n’roll. Il a 16 ans quand il monte sa première formation : les Strangeurs (avec un « u »pour éviter de confondre avec un autre groupe qui s’appelait les Strangers). A l’époque, il était batteur. Très vite, les Strangeurs changent de nom et deviennent Chain Reaction. En 1966, ils enregistrent deux singles : The Sun/When I Needed You et You Should Have Been Here Yesterday/Ever Lovin’ Man. Ils peuvent même se vanter de faire les premières parties de groupes comme les Yardbirds, les Byrds ou les Beach Boys. Eté 70, Steven s’en va passer ses vacances à Sunapee, dans le New  Hampshire. C’est là qu’a lieu sa rencontre avec Joe Perry. Dans l’arrière-boutique d’un marchand de glaces ! (En Grande-Bretagne, les groupes de rock naissent dans un pub. Question de culture et de climat sans doute). Joe Perry joue alors de la guitare avec le Jam Band. Les deux groupes fusionnent pour donner Aerosmith. Steven abandonne la batterie pour le chant, Joe garde son instrument et s’adjoint un second guitariste, Ray Tabano, remplacé dès 1971 par Brad Whitford. Tom Hamilton tient la basse et Joey Kramer la batterie. Pourquoi baptisent-ils leur groupe Aerosmith, après avoir un temps envisagé de s’appeler Hookers, « Les Putes » (c’était pas mal non plus) ? Bonne question ! Il semblerait que ce soit Joey Kramer qui ait choisi le nom. Alors qu’il était encore étudiant, il avait beaucoup aimé l’album d’Harry Nilsson, Aerial Ballet (Ca ne vous dit rien ? Et pourtant, vous connaissez un des titres par cœur, Everybody’s Talkin’, qui figure sur la B.O. du film Midnight Cowboy). L’idée lui vint de chercher des noms de groupes qui commençaient par Aero, il tomba sur Aerosmith qui lui plut tellement qu’il l’écrivait absolument partout : au cutter sur sa table, au blanc sur sa trousse, au marqueur sur la couverture de ses cahiers. C’est tout naturellement que, le moment venu, il proposa ce nom aux autres membres du groupe. Ceux-ci crurent tout d’abord qu’il leur parlait du roman de Sinclair Lewis, Arrowsmith, qu’on les avait forcé à étudier en classe mais, lorsqu’il l’eut épelé, le nom fut adopté parce qu’il sonnait bien.

Les cinq affreux de Boston

   Le groupe rode son show dans un club de Sunapee, The Barn (La Grange). Il touche la somme mirifique de trente dollars par soir mais, grâce au bouche à oreille, sa popularité grandit et lui permet de s’installer carrément à Boston. Boston, Mets tes chaussettes ! Oops ! Massachusetts (Pardonnez-moi, je ne résiste pas à ce genre de jeu de mots vaseux, il faudra vous y faire !). Après deux ans passés à écumer tous les bars de Boston, vient l’heure de la consécration, Aerosmith joue au Max’s Kansas City, le célèbre club new-yorkais. Impressionné par leur prestation, Clive Davis, Président de Columbia Records, leur offre un contrat. Ils sortent un premier album éponyme en 1973. Les rock critics, peu sagaces sur ce coup-là, font semblant d’ignorer que Steven signe sept des huit titres qui le composent (il n’y a, fait exceptionnel pour un premier disque, qu’une seule reprise, celle de Rufus Thomas, Walkin’ The Dog) et ne voient en lui qu’un clone de Mick Jagger : même bouche, même déhanché. Le single Dream On atteint péniblement la cinquante-neuvième place des charts et il faudra attendre trois ans pour que cette superbe ballade soit rééditée et fasse un carton. Leur deuxième album, Get Your Wings (1974) sur la pochette duquel l’on peut voir pour la première fois le fameux « A » ailé qui devait devenir leur logo ne connaît pas un meilleur sort, malgré des titres comme Train Kept A-Rollin’, Lord Of The Thighs et Same Old Song And Dance. Le succès arrive enfin avec Toys In The Attic, Les Jouets Dans Le Grenier (1975). Le disque est certifié platine assez rapidement et restera plus d’un an dans les hit-parades. Il contient de grands classiques comme Sweet Emotion ou Walk This Way qui connaîtra une seconde jeunesse, onze ans plus tard, grâce au groupe de rap Run-DMC. Je pourrais évidemment continuer de retracer la carrière d’Aerosmith jusqu’à aujourd’hui, mais ces années-là, chers lecteurs, vous êtes censés les connaître. Je préfère finir par les anecdotes qui courent sur les cinq affreux de Boston (à noter que c’est la même formation depuis le début, un fait rare qui mérite d’être signalé) et leur penchant pour les substances illicites. Et ceci pour deux raisons. 1. On n’a plus tellement l’occasion de rigoler de nos jours. 2. Même si ces anecdotes sont trop belles pour être vraies, elles témoignent qu’on mesure la grandeur d’un groupe au mythe qui l’entoure. Un jour, défoncés, Tyler et Perry, les « Toxic Twins », arrêtent leur concert après un seul morceau. Ayant commencé d’entrée par le dernier titre de la set list, ils avaient cru que le concert était fini. Une autre fois, Tyler suggère à Perry de reprendre une chanson qu’il vient d’entendre à la radio et qu’il trouve géniale, Perry lui fait gentiment remarquer que la chanson s’appelle You See Me Cryin’, qu’elle est d’eux et qu’elle figure sur l’album Toys In The Attic qu’ils ont enregistré dix ans auparavant !!!

                                                                                                   Jumpin’ Jack D.