mardi 2 octobre 2012


THE  YARDBIRDS

En ces temps de crise, allez, un peu de nostalgie ! Laissez-vous porter en arrière. Qu’elle était belle, l’époque insouciante des  « swingin’ sixties » : minijupes, bagnoles de sport, petits bars…et groupes de rock ! Les Yardbirds sont de retour avec 2 membres de la formation d’origine : Jim Mc Carty et Chris Dreja, accompagnés du chanteur-bassiste John Idan dont ils ne se séparent plus depuis 94. En première partie, ne ratez pas les régionaux de l’étape : Sugar Mama et leur génial batteur Patrick Dallongeville.

« Caltez, volaille ! »

          Le Railway Hotel, Londres, 1963. Sur scène : le Metropolis Blues Quartet. Le public présent est loin de se douter qu’il assiste aux premiers battements d’ailes d’un des groupes les plus influents du rock anglais. Derrière le micro, Keith Relf, 20 ans, coupe de cheveux à la Brian Jones, asthmatique, ce qui ne l’empêche pas de se démener comme un beau diable tout en soufflant dans son harmonica. La guitare solo est tenue par Anthony « Top » Topham. A la guitare rythmique, Chris Dreja, grand échalas de 18 ans, la tranquillité incarnée. A la basse, Paul Samwell-Smith et à la batterie, Jim Mc Carty. On est en plein « British Blues Boom » et leur répertoire, comme celui des Rolling Stones ou des Animals, est fondé sur de vieux classiques des bluesmen noirs américains. Dans la salle, un petit cercle d’initiés apprécie leur prestation mais le Metropolis Blues Quartet, ça fait ringard, non ? S’ils veulent faire carrière, il leur faudra changer de nom. Ils décident donc de s’appeler The Yardbirds, « La Volaille ». Pour ceux qui penseraient, à juste titre, que ça ne valait guère mieux, précisons tout de même que « yardbird » est aussi un terme argotique désignant les vagabonds qui traînent dans les gares en attendant le prochain train. On peut également y voir un hommage à Charlie « Bird » Parker dont ils écoutaient les disques à la maison. Maintenant qu’ils ont un nom, ils ont besoin d’un nouvel endroit pour se produire. Le destin sonne à leur porte en la personne de Giorgio Gomelsky. Cet homme, qui est à moitié français par sa mère et à moitié russe par son père, tient un club à Richmond, dans la banlieue londonienne : le Crawdaddy, nommé ainsi en référence à Bo Diddley. Ce genre d’endroit est typique des sixties, tout comme le sont la Cavern à Liverpool, le Marquee à Londres…ou le Twenty à Mouscron. Tout part du fait que les Rolling Stones sont devenus célèbres et qu’ils quittent le Crawdaddy après le succès de leur premier 45 tours Come On. Giorgio Gomelsky et son associé Hamish Grimes cherchent des successeurs aux Stones. Ils font passer une audition aux Yardbirds et sont impressionnés, au point de les engager comme nouveau groupe résident. Gomelsky devient également leur manager. Sommé par ses parents de reprendre ses études, le jeune Topham-il n’a que16 ans-est remplacé par un étudiant des Beaux-Arts de Londres, un certain Eric Clapton. Topham aura tout de même été le guitariste des Yardbirds entre mai et octobre 1963. Clapton a déjà joué dans deux groupes : les Roosters et Casey Jones and The Engineers et, même s’il n’est pas encore au sommet de son art, il a acquis une petite réputation en tant que guitariste. Avec son arrivée, les Yardbirds commencent à véritablement décoller, normal pour des oiseaux ! Au début décembre 1963, ils se paient même le culot d’enregistrer avec Sonny Boy Williamson. Le 20 mars 1964, ils enregistrent Five Live Yardbirds au Marquee, qui vient tout juste d’emménager au 90 Wardour Street (où il restera jusqu’en1988). L’album est uniquement constitué de reprises. Tout est bon, mention spéciale pour I’m A Man de Bo Diddley et Smokestack Lightnin’ considéré comme une des meilleures versions par Howlin’ Wolf himself de son vivant. Le 1er mai 1964, sort leur premier 45 tours : I Wish You Would/A Certain Girl. Il ne marche pas très fort, ni le suivant d’ailleurs : Good Morning Little Schoolgirl/I Ain’t Got You. Le second titre, piqué chez Jimmy Reed, vole la vedette au premier. Le fait que Rod Stewart ait enregistré une bien meilleure version de Good Morning Little Schoolgirl, peu de temps auparavant n’y est sans doute pas étranger. Les Yardbirds deviennent véritablement populaires avec For Your Love (1965). Le single se classe rapidement 32éme dans le Hit, ce qui est beaucoup mieux que les autres sortis précédemment. For Your Love restera leur chanson la plus connue mais Clapton n’aime pas l’orientation pop de ce morceau : clavier trafiqué, joué par Brian Auger, bongos, violoncelle. Il refuse même de le jouer sur scène. Il veut rester dans le blues et accuse les autres de devenir commerciaux. Il quitte le groupe en février 1965 et décide alors de rejoindre les Bluesbreakers de John Mayall. John Mayall qui, à l’âge de 75 ans, nous a gratifié d’un superbe concert à Lille le 9 octobre dernier.

Prise de bec

         Clapton parti, le groupe part à la recherche d’un nouveau guitariste. Jimmy Page ayant refusé l’invitation, c’est son ami Jeff Beck qui s’y colle. Il a fait partie de petits groupes éphémères, à la renommée inégale : The Nightshift, The Deltones, The Tridents. C’est un passionné de voitures et un bricoleur, ce qui explique peut-être qu’il aime expérimenter de nouvelles techniques avec sa guitare : réverbération, fuzz-box et distorsion. Sous son influence, les Yardbirds vont défricher des terres inconnues : psychédélisme et hard rock. Beck marquera la période la plus faste du groupe. C’est avec lui qu’ils graveront leurs meilleurs morceaux : Heart Full Of Soul, Evil Hearted You, Still I’m Sad, Shapes Of Things...1966 est une année noire. En juillet, Samwell-Smith quitte le groupe pour convenances personnelles : il préfère devenir producteur (Cat Stevens), il en a surtout marre des longues tournées. Il est remplacé par Jimmy Page qui doit se contenter de cette place de bassiste car, à l’époque, il n’est que musicien de studio. La vedette c’est Beck…jusqu’à ce que ce dernier soit touché par les feux de l’amour et les charmes non négligeables d’une jeune starlette de cinéma : Mary Hughes. Sa conscience professionnelle en pâtit : il est de plus en plus souvent en retard ou carrément absent. Les dissensions s’accentuent entre lui et les autres membres du groupe. En octobre 1966, il est officiellement viré. Page échange alors sa basse pour la guitare de Dreja. Les Yardbirds enregistrent encore deux albums : Little Games (1967) et Good Night Sweet Josephine (1968) mais le groupe finit par se séparer pour de bon, Relf et Mc Carty partant fonder Renaissance et Dreja se consacrant à la photo (c’est lui qui signera notamment la photo qui figure au verso de la pochette du premier album de Led Zeppelin).

                                                                                      Jumpin’ Jack Devemy