mardi 25 septembre 2012
OoxxxxO
A S I SS A S I S
ou le manuel du
parfait petit rock’n’roller
« A quoi bon commencer quelque chose si ce n’est pas
pour être les meilleurs ? On voulait à tout prix se sortir du chômage et
des galères. Gagner le maximum de blé en un minimum de temps ! »
(Noel Gallagher). Mission accomplie. Oasis a sorti son huitième album Don’t
Believe The Truth fin mai 2005. C’est une habitude mais ce disque est
encore génial. La tournée passera par le Zénith de Lille le 29 janvier avec
Stereophonics en première partie, le groupe même qui accompagna les Stones en
France lors de leur dernière tournée. C’est vous dire ! Et le concert sera
sold out ! Comment expliquer une telle réussite ? En cette période de
rétrospectives, jetons un coup d’œil par-dessus l’épaule !
Racailles
Le père
Gallagher, comme l’indique son patronyme, est d’origine irlandaise. Emigré à
Manchester, dans le fol espoir d’y trouver du boulot, il se retrouve très vite
dans la peau d’un Andy Capp paresseux, délaissant sa femme au profit de ses
compagnons de beuverie. Il est chassé par sa famille et c’est ainsi que Noel et
Liam seront élevés par leur mère et leur frère aîné, Paul. Que faire quand on
habite la banlieue sud ouvrière de Manchester, qu’on est peu intéressé par
l’école, qu’on a le chômage pour seul horizon… et qu’on s’ennuie à
mourir ? Bien sûr, il y a le football. Et ils soutiennent ardemment
Manchester City, gare à celui qui aurait l’outrecuidance de taguer sur les murs
de la ville : Manchester United rules OK, il passerait un mauvais quart
d’heure ! Mais le foot, c’est le dimanche. Et le restant de la
semaine ? On s’occupe comme on peut. A quinze ans, Noel jette un pot de
fleurs à la tête de son directeur d’école… Il est renvoyé. A seize ans, il
cambriole une boutique du quartier…Il est arrêté par la police et passe
quelques jours à l’ombre. Il pratique toutes sortes de métiers pour
subsister : marchand des quatre saisons, laveur de carreaux, promeneur de
chiens, ramoneur, boulanger, peintre de panneaux de signalisation, fabricant
d’aquariums. Pendant ce temps, son jeune frère Liam tue le temps en sniffant de
la colle et en buvant du whisky. Noel confirme la chose dans une interview
accordée aux Inrockuptibles en 94 : « Quand on revenait du boulot, il
n’y avait rien d’autre à foutre. Le foot et la colle : voilà à quoi
ressemblait notre vie. »
De Rain à Oasis : une Histoire d’O
Heureusement
pour eux…et pour nous, les frères Gallagher découvrent un autre moyen
d’échapper à la sordide grisaille de leur quotidien : la musique !
Qu’elle soit des années 60 : Who, Kinks, Rolling Stones, Beatles (pour
l’anecdote, Noel naît le 29 mai 67, le jour même où , lors d’une
conférence de presse, les Beatles annoncent la sortie de Sergeant Pepper),
des années 70 : Sex Pistols, Damned , Jam, Buzzcocks (originaires eux
aussi de Manchester) ou des années 80 : U2, Smiths, La’s, Stone Roses. Ne
restait plus qu’à mélanger tout ça dans un immense chaudron pour obtenir la
potion magique dont allait se nourrir leur projet encore dans les limbes. Liam
est le premier à se lancer dans l’aventure : dès 90, il monte son propre
groupe, Rain, avec ses camarades de classe Paul Arthurs, surnommé
« Bonehead » (le crétin !) à la guitare, « Guigsy »
Paul McGuigan à la basse et Tony McCarroll à la batterie. A noter que Rain
tirait son nom d’un single des Beatles datant de 66 : en fait la face B de
Paperback Writer. De son côté, Noel a passé une audition pour devenir
chanteur des Inspiral Carpets, fin 88. « Ils n’ont pas voulu de moi, ces
pédés ! » commentera-t-il plus tard. Il devient finalement roadie et
tourne avec eux en Europe et en Asie. A son retour, Liam lui propose de devenir
le manager de Rain. Déjà tête de lard,
celui-ci refuse et exige : 1. d’être intégré au groupe comme guitariste 2.
de le rebaptiser Oasis. Pourquoi Oasis ? Les explications divergent, il
semblerait même que Noel prenne un malin plaisir à trouver une version
différente à chaque interview. Tantôt il s’agirait du nom d’une boutique de chaussures
de Manchester spécialisée dans les Doc Martens, tantôt ce serait une compagnie
de taxis de Burnage ou encore un marchand de curry situé en bas de chez
Bonehead. A vous de choisir ! Toujours est-il qu’il prend les pleins
pouvoirs. Il soumet le groupe à d’intenses répétitions dans une cave, le
Boardwalk. « Lorsque nos amis nous proposaient d’aller au pub ou de nous
rendre à leur mariage, nous refusions : nous répétions. » (Bonehead).
Il achète du matériel. Pas autant qu’il le voudrait ! Sa plus grande
frustration, il l’éprouve ce jour de décembre 92 où, accompagnant Johnny Marr
des Smiths dans un magasin de Doncaster, il le voit dépenser plus de 9000 £ en
guitares. Enfin il apporte au groupe ses propres chansons, dont Live
Forever.
Manque un Mancunien
En 93 Oasis est fin prêt mais il lui faut
dégoter un contrat. L’occasion se présente le 31 mai. Les 18 Wheeler, les
protégés d’Alan McGee, sont en concert et Oasis sait que le patron du label
Creation sera dans la salle. Ils se sont arrangés pour jouer en première partie
mais, à la dernière minute, le promoteur obtus s’oppose à leur prestation. Peu
enclins à se laisser impressionner par ce paltoquet, ils menacent de mettre le
feu à la salle et finissent par jouer 4 morceaux. A trois heures du matin, McGee,
enthousiasmé, téléphone à son bureau londonien et jure qu’il tient là une
fortune. Quelques concerts en première partie de Liz Phair, St Etienne et les
Milltown Brothers enlèvent le morceau. Et en août 93 Oasis signe son contrat.
McGee envoie aux radios la maquette de Columbia. Son inscription
immédiate sur la play-list de Radio One – alors qu’Oasis n’a encore publié
aucun disque- le conforte dans l’opinion qu’il vient de réaliser là la
meilleure opération de sa carrière. Le 11 avril 94, Oasis sort un premier
single, Supersonic, qui enflamme le public et les critiques. Il
transforme l’essai en septembre avec l’album Definitely May Be. Le tout
est accompagné de scandales très rock’n’rollesques : le groupe se fait
virer du Columbia Hotel pour avoir canardé une Mercedes avec des canettes
depuis les fenêtres, bagarre générale au Riverside, un club de Newcastle. Tony
McCarroll, le batteur, est remplacé par Alan White en avril 95. Manque un
Mancunien, mais peu importe ! La machine rock’n’roll vient de transcender
les individus. Comme le déclare Liam : « Nous ne contrôlons plus
rien. C’est comme une voiture lancée à fond, mais sans les freins. »
Happy New Year ! Keep on rockin’ !
Jumpin’ Jack Devemy
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