jeudi 4 octobre 2012
Quand on l’avait reçu à la fin des
années 80, on l’avait adoré, ce cadeau de mariage. Puis, avec le temps, on
l’avait délaissé. Il faut bien dire qu’il avait peu fait pour nous reconquérir.
Alors, on avait fini par le remettre précieusement dans son papier d’emballage.
Vingt ans plus tard, nos doigts fébriles le redécouvrent intact.
Les Wedding Present viennent de
sortir, chez Talitres, un double CD : Live 1987. Ces deux disques,
le premier enregistré le 5 mai à Leicester, le second le 22 novembre à Munich,
originellement édités en cassettes vendues après leurs concerts ou par
l’intermédiaire de leur fanzine, n’avaient jusqu’à présent jamais été réédités.
A noter que le texte du livret a été rédigé par Shaun Charman, le premier batteur.
Une bonne nouvelle en amenant une autre, David Gedge et sa bande entament une
grande tournée européenne à l’occasion du 20ème anniversaire de la sortie de
leur premier album : George Best, album qui sera joué dans son
intégralité lors de chaque concert. Et sachez, bande de petits veinards, que
cette tournée passera par la Rotonde du Botanique, à Bruxelles, le 17 novembre.
Ne ratez pas ce rendez-vous avec l’Histoire.
The Wedding Present … et
passé
Comme beaucoup de parents soucieux de
l’avenir de leur progéniture, les parents de David Lewis Gedge, originaires de
Leeds, auraient bien aimé que leur fils entreprenne des études
« sérieuses ». Malheureusement pour eux (heureusement pour
nous !), David n’a qu’une idée en tête : former un groupe de rock, et
c’est en cachette qu’il achète sa première guitare à l’âge de 15 ans. Malgré
tout, pour leur faire plaisir et avoir la paix, il décroche une licence de
maths avant de se consacrer entièrement à al musique. Son premier groupe, les
Lost Pandas, éclate en 84 lorsque sa petite amie, Janet Rigby, qui officie à la
batterie, lui préfère le guitariste Michael Duane. Janet et Michael se barrent
à New York. David ravale son chagrin et décide de poursuivre l’aventure avec le
bassiste Keith Gregory. Il remplace les deux amants fugueurs par le batteur
Shaun Charman et le guitariste d’origine ukrainienne, Peter Solowka et, faisant
preuve d’un humour typiquement britannique, il rebaptise le groupe The Wedding
Present (« Le Cadeau de Mariage »). L’histoire commence en 85 avec le
premier single Go Out And Get ’Em Boy ! produit par leur propre
label Reception Records et pressé à 500 exemplaires. La presse spécialisée lui
réserve un accueil enthousiaste, notamment le New Musical Express qui qualifie
The Wedding Present de « groupe le plus rapide du monde ». Mais c’est
surtout le soutien du légendaire animateur de la BBC1, John Peel, qui leur vaut
de se forger rapidement une belle notoriété. John Peel qui disait de
David : « Ce garçon a écrit quelques-unes des plus belles
chansons d’amour de l’ère du rock’n’roll. Vous pouvez ne pas être d’accord,
mais j’ai raison et vous avez tort ! » . Les deux hommes se vouaient
d’ailleurs une admiration réciproque. David déclare dans une interview
(novembre 2004) : « C’était un homme très gentil, trop jeune pour
mourir (il nous a quittés le 25 octobre 2004 à l’âge de 65 ans), le monde de la
musique va être différent sans lui. Beaucoup de groupes ont été découverts par
John Peel, probablement 75% des groupes actuels ont été lancés par lui. C’est
lui qui passait pour la première fois leur disque. » Toujours est-il que
le premier album des Wedding Present, George Best, publié fin 87,
connaît un succès immédiat et se vend à plus de 70 000 exemplaires. Pour
ceux qui ignoreraient qui était George Best, c’était un footballeur de l’équipe
de Manchester dans les années 70, connu pour son immense talent comme pour sa
vie de débauche. « J’ai claqué beaucoup d’argent dans l’alcool, les filles
et les voitures de sport – le reste, je l’ai gaspillé. » « J’avais
une maison au bord de la mer. Mais pour aller à la plage, il fallait passer
devant un bar. Je n’ai jamais vu la mer. » (George Best). Mais revenons à
nos Wedding Present. En 89, ils signent un contrat avec RCA, tout en
s’attachant à préserver leur indépendance : ce sont eux qui choisissent
leur producteur et décident de la sortie des singles. Ils publient Ukrainski
Vistupi V Johna Peela, un mini-album où ils interprètent des morceaux du
folklore ukrainien, accompagnés d’un joueur de balalaïka et de mandoline.Ils
enchaînent avec Bizarro, deuxième véritable album. Seamonsters
(91) constitue une sorte d’aboutissement pour le groupe : « mur de
son » à la Phil Spector, guitares noisy portées par une basse métallique
et une batterie rageuse, tout en rythmes décalés, montées orgasmiques et,
cerise sur le gâteau, la voix nasillarde de David qui n’est pas sans rappeler
celle d’Ian Curtis de Joy Division. L’album est produit par Steve Albini que
l’on retrouve avec Nirvana. Une petite anecdote : à Reading en 94,
Courtney Love surgit en backstage et se précipite sur David pour lui donner des
baffes. « Steve Albini ! Vous êtes un ami de Steve
Albini ? ».
David Gedge nous fait son
Cinerama
En 92 , les Wedding Present sont
au sommet de leur carrière. Ils forment alors un projet unique en son
genre : au lieu de se lancer dans un nouvel album, ils décident de changer
de format et de sortir, chaque mois de l’année 92, un single avec une chanson
originale en face A et une reprise en face B. Ils doivent forcer la main à RCA
qui doute qu’un groupe soit capable de produire 12 singles de qualité dans une
même année. Et pourtant les Wedding Present réalisent l’exploit. Tirés à
10 000 exemplaires, ces singles se vendent tous comme des petits pains, ce
qui permet au groupe d’établir un record incroyable : avoir 12 chansons
classées dans le top 30 UK en 1 an (à
égalité avec Elvis Presley). A travers les reprises éditées au fil des mois,
ils accomplissent cette autre prouesse : bâtir le plus beau kaléidoscope
du rock anglo-américain qu’on puisse imaginer. Pleasant Valley Sunday des Monkees, Don’t Cry No Tears
de Neil Young, Shaft d’Isaac Hayes, Chant Of The Ever Circling
Skeletal Family de David Bowie, Cattle and Cane des Go-Betweens ... Le
tout sera compilé sur les Hit Parade 1 & 2. 93 voit le départ de
Keith Gregory – le dernier des membres de la formation d’origine, à part Gedge
– remplacé par Darren Belk. Ayant signé sur le label Island, le groupe sort un
nouvel album en 94 : Watusi. Mais les ventes sont décevantes et, en
97, David dissout The Wedding Present pour fonder Cinerama avec sa compagne de
l’époque Sally Murrell. L’aventure, tant sentimentale qu’artistique, se révèle
n’être qu’un feu de paille. En 2005, Take Fountain, enregistré sous la
houlette de Steve Fisk, pionnier de la scène rock avant-gardiste de Seattle,
marque le grand retour de ceux que leurs fans appellent familièrement les
« Weddoes ». A très bientôt, les Weddoes !
Jumpin’ Jack Devemy
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